L’éditeur français de logiciels de santé connaît une croissance continue et intègre dans ses efforts de R&D l’intelligence artificielle pour conquérir de nouveaux marchés en e-santé. Rencontre avec Philippe Blanco, DG de l’entreprise.
On accuse souvent la technologie de prendre le pas sur l’humain. Chez Evolucare, comment envisage-t-on la question du patient ?
Le patient – et au-delà le citoyen – se place au centre de nos réflexions. Il ne peut en être autrement puisque nos solutions, qui sont destinées aux secteurs du sanitaire et du médico-social, couvrent l’ensemble du parcours du patient et non seulement son parcours hospitalier. Cela veut dire qu’Evolucare s’adresse également aux associations dans le domaine du handicap ainsi qu’aux maisons de retraite. Nos plateformes logicielles proposent une vue complète sur le parcours tant médical que médico-social de la personne concernée. Aujourd’hui, nous réalisons un chiffre d’affaires (CA) de 30 millions d’euros et sommes près de 300 collaborateurs contre un CA de 7 millions d’euros et une équipe de 50 personnes, il y a 10 ans. Notre objectif pour 2021 est d’atteindre les 45 millions d’euros.
Comment expliquez-vous cette progression ?
Notre marché est tiré par les réformes réglementaires : création des groupes hospitaliers de territoire, obligation de mise en conformité du DMP… D’autre part, les attentes de chacun d’entre nous vis-à-vis de la communauté médicale ont considérablement évolué ces quinze dernières années. C’est le cas en matière de facilité d’échange avec les organisations de santé (comme les établissements hospitaliers), en matière de sécurité, mais aussi en ce qui concerne la communication d’information : prise de rendez-vous sur Internet, accès au dossier médical partagé à partir du mobile, accessibilité aux résultats de laboratoire ou d’imagerie, etc. La communication d’informations de santé nécessite la mise au point quasi-permanente de systèmes innovants. D’où l’importance fondamentale de la recherche et développement.
Quel rôle va jouer l’intelligence artificielle dans la conception de nouvelles solutions ?
Evolucare est une société conduite par l’innovation technologique. Nos équipes développent des logiciels qui vont de la gestion des établissements aux applications médicales proprement dites. Nous avons également créé « l’Evolucare Labs ». Ce dernier travaille avec le monde de la recherche académique pour développer de nouvelles manières de traiter les patients, notamment en matière de dépistage et de diagnostic. C’est d’ailleurs avec l’APHP et l’Inserm que nous développons une solution, très performante et peu onéreuse, qui répond au nom de « OphtAI ». Elle est basée sur un algorithme d’intelligence artificielle hébergé dans le Cloud. Sur la base d’une image rétinienne, elle permet de détecter instantanément les trois pathologies les plus fréquentes de l’œil que sont la rétinopathie diabétique, le glaucome et la DMLA. Ce type de solutions, qui démocratise l’expertise ophtalmologique, est conçue pour s’inscrire dans un parcours de télé suivi favorisant la prévention, le dépistage et le diagnostic des maladies oculaires. OphtAI est actuellement en déploiement dans plusieurs pays (France, Allemagne, Canada, Chili, Mexique, Liban, Turquie…) avec de nombreuses perspectives de développement et d’usages propres à chaque réglementation. L’ambition est claire : devenir la référence mondiale en intelligence artificielle dédiée à l’ophtalmologie.
Cela illustre-t-il vos ambitions à l’international ?
Evolucare est très actif sur les marchés de l’Afrique, du Maghreb et du Moyen-Orient, particulièrement dans les pays francophones. Nous possédons également des filiales en Chine et au Canada et avons développé une activité très forte en Amérique latine. Notre ambition actuelle est de nous étendre en Europe. Les marchés que nous visons à court terme sont l’Allemagne et l’Europe du Nord.
Juillet 2020 – Libération